MIGRASYL

News on migration and asylum from around the region - Nouvelles de la région sur les questions de migration et d'asile

Wednesday, February 04, 2015

[SUISSE] Mediapart: Dans nos pays, il n’y a que les morts que l’on met sous terre...

30 janvier 2015

A Genève, des demandeurs d'asile, qui vivent dans des abris de la Protection Civile (PC), viennent d'adresser une lettre à l'Hospice général (l'organisme chargé de l'assistance publique). La parole de ces personnes est tellement rarement entendue qu'il m'a paru important de relayer ici leur courrier.

"Nous sommes des requérants d’asile logés dans des bunkers – ou dans des conditions similaires – à Genève : Annevelle, Châtelaine, Alexandre-Gavard. Nous vous écrivons aujourd’hui pour vous faire part de notre situation car nous ne supportons plus d’habiter dans ces conditions.
Nous venons d’Erythrée, de Syrie, du Soudan... Chez nous, nous avons connu l’emprisonnement, la torture, la guerre. Nous avons fui pour sauver nos vies. La situation politique ne nous permettait plus de rester dans nos pays. Nous avons dû quitter nos familles, nos maisons. Sur la route, nous avons connu de nombreux dangers: nous avons été enfermés dans des camps, nous avons traversé le désert à pied, et finalement la Méditerranée. Beaucoup de nos compatriotes et amis sont morts en chemin. Aujourd’hui, nous sommes en Suisse, « terre d’asile », et nous sommes reconnaissants à ce pays et à ses habitants de nous accueillir. Pourtant ici aussi, on nous empêche de mener une vie digne.
Nous vivons sous terre, entassés, sans fenêtres, sans air, sans soleil, pour certains depuis plus d’une année. Nous avons de gros problèmes d’hygiène, de nourriture et de sommeil, qui altèrent gravement notre santé tant physique que psychique. Les toilettes et les douches sont en nombre totalement insuffisant (2 douches et 6 toilettes pour 80 personnes) et, de ce fait, sont la plupart du temps dans un état de propreté déplorable. La promiscuité nous expose sans cesse aux maladies et à la contagion, d’un simple rhume à la grippe intestinale en passant par la gale. Sans parler des punaises de lit. L’air est difficile à respirer. Nous souffrons de problèmes oculaires et de maladies de peau. Nous n’avons pas la possibilité d’avoir accès à des espaces où nous pourrions cuisiner et sommes donc dépendants de la nourriture qui nous est servie: aucun légume frais; couscous, riz ou spaghetti au quotidien ; nourriture préparée depuis des jours, qui stagne dans les frigos, et qui est parfois avariée quand on nous la sert; même le pain est souvent dur. La lumière est allumée 24 heures sur 24, nous empêchant de dormir. Tout comme le bruit, la ventilation, le fait que les lits soient connectés entre eux, les ronflements des uns et les cauchemars des autres. Nous n’avons aucune intimité.