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News on migration and asylum from around the region - Nouvelles de la région sur les questions de migration et d'asile

Friday, February 20, 2015

[MAROC] Jeune Afrique: Moi, Aïssatou, Guinéenne régularisée au Maroc, mais toujours en sursis


16 février 2015

Aïssatou Barry est une migrante guinéenne qui a survécu à l'enfer du tristement célèbre camp de Gourougou, dans le nord du Maroc, qui abrite les migrants clandestins voulant rallier l'Espagne. Régularisée, mais toujours dans la précarité, elle témoigne aujourd'hui de son calvaire et de celui de ses cinq enfants.  
"Ils sont en train de vider les forêts", gronde Aïssatou Barry en tapotant avec frénésie sur son téléphone. À l’autre bout du fil, un militant de l’Association marocaine des droits de l’homme parle d’une rafle de 1 200 personnes, menée ce mardi 10 février par les autorités marocaines dans le massif de Gourougou, aux environs de Nador. "Il y a 37 femmes et cinq enfants parmi eux", souffle la Guinéenne avant de reprendre de sa voix de cheftaine, pleine d’une rage sourde, sa conversation téléphonique : "Ils vont les mettre en isolement avant de les expulser. Faites tout ce que vous pouvez pour les sortir de là. Je vous en prie. Je compte sur vous." 
Nous sommes au quartier Petit Socco à Tanger, au fond d’une ruelle sombre et sinistre. Ici, dans un réduit d’à peine quinze mètres carrés s’entassent Aïssatou et ses cinq enfants. Khadija, l’aînée de la fratrie, a dix ans. Le benjamin, Najib, aura deux ans et demi en avril. "Je n’ai qu’un lit. Alors je les aligne dessus et je dors par terre", confie entre deux rires nerveux cette veuve trentenaire originaire de Guinée et de nationalité libérienne.
Régularisée il y a tout juste un mois, Aïssatou Barry a vécu clandestinement au Maroc depuis son arrivée à Oujda en 2011, après avoir perdu son mari, militaire ivoirien pro-Gbagbo, dans les affrontements qui ont suivi l’élection présidentielle contestée de 2010. "J’ai fui le pays à pied avec mes enfants. La traversée a duré 21 jours. C’est une souffrance que je ne vais jamais oublier, une souffrance qui est dans mon cœur."