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Dans le camp de réfugiés
d'Harmanli, en Bulgarie, près de la frontière turque, il y a un vieil homme qui
marche sans but, le regard dans le vague.
Il y a quatre mois, Abou,
sa femme et ses trois fils ont voulu traverser la frontière entre la Turquie et
la Bulgarie. A travers les montagnes et les forêts, cette famille syrienne
s'est faufilée vers l'Europe, en espérant atteindre ensemble Golyam Dervent, le
premier village bulgare, le premier village européen.
A un moment du passage
clandestin, le groupe s'est séparé. « Ma femme et deux de mes fils sont restés
du côté turc. La police les a empêchés de passer. » C'était il y a quatre mois,
et depuis il ne les a pas revus. Son passeport, c'est sa femme qui l'avait, si
bien qu'Abou ne peut ni retourner en Turquie ni sortir de Bulgarie. Quant à
faire venir les siens jusqu'ici, c'est évidemment hors de question tant qu'il
n'aura pas reçu le statut officiel de réfugié. Sans autre recours que
l'attente, il secoue la tête en signe d'impuissance et tire brusquement sur sa
cigarette. « Je ne peux rien faire, j'ai l'impression que personne ne m'écoute,
ma seule solution c'est d'attendre, c'est tout. » Un dernier regard, et le
voilà qui tourne les talons pour arpenter de nouveau le camp, son corps ici et
ses pensées ailleurs.