Aïssa Kadri
-Quelles sont les conditions socioéconomiques et politiques qui poussent un certain nombre de Subsahariens à quitter leur pays pour d’autres cieux ?
Les causes et les raisons sont nombreuses et diverses. Il y a des causes contextuelles, factuelles et d’autres plus structurelles. Parmi ces dernières, une des causes lointaines des migrations ouest-africaines actuelle est l’absence de «socialisation» des frontières héritées du découpage colonial. Il existe en effet un continuum ethno-démographique qui transcende les frontières : les Touareg couvrent plusieurs Etats post-coloniaux (Mali, Niger, Burkina Faso, Algérie, Libye, Tunisie), et les Peuls, par exemple, selon le chercheur Demba Fall, sont disséminés sur «toute la bande allant du Sénégal à l’Adamaoua». Les populations sont ainsi connectées à des territoires et terroirs sociologiques transfrontaliers très anciens à l’intérieur desquels, elles ont construit divers réseaux d’appartenance et d’identification qui sont en recompositions complexes sous l’effet de rapports de force aussi bien internes qu’externes.